Publié le: 09 mai 2014

Grégoire Droz: « Quand je veux quelque chose, je travaille pour l’obtenir !»

Grégoire Droz: « Quand je veux quelque chose, je travaille pour l’obtenir !»

Né à Zurich, malentendant de naissance, Grégoire Droz vit à Neuchâtel depuis qu’il a 3 ans. Ce jeune homme d’une maturité exceptionnelle et doté d’une véritable éloquence ne s’interdit aucun rêve. Elevé à l’école de la vie, engagé en politique dans son canton, il espère bien devenir journaliste de radio.

Vous faites preuve d’une maturité impressionnante pour votre âge. D’ailleurs, on vous donne plutôt 20 ans et pas 16 !

C’est vrai, tout le monde me le dit, mais j’ai toujours été comme ça ! Peut-être est-ce parce que je viens d’une famille monoparentale. Dans ma famille, il fallait d’abord payer les factures et ensuite penser aux loisirs (rires…) J’ai donc toujours su ce que c’était que de se serrer la ceinture, et ça forge le caractère. Et puis, peut-être les troubles de l’audition ont-ils également joué un rôle…

Depuis quand êtes-vous malentendant ?

Depuis la naissance en fait, mais on ne s’en est rendu compte que quand j’avais 4 ans. Mon pédiatre avait pensé à me faire tous les tests possibles et imaginables, mais il n’a jamais envisagé de tester mon ouïe. Jusqu’au jour où, lorsqu’on est arrivés à Neuchâtel, un ami de ma maman, lui-même malentendant, a remarqué que j’avais un problème! En fait, jusque-là c’est mon grand frère qui m’avait spontanément servi d’interprète ! Après bien sûr,  j’ai été appareillé pour une perte auditive sévère des deux oreilles…

Vous avez terminé  votre scolarité obligatoire en juin dernier et reçu le Prix aux élèves malentendants…

Oui, et ce qui a été génial, ça a été de découvrir par ce biais forom écoute, dont je n’avais jamais entendu parler jusque-là. Enfin, une institution qui s’occupait des problèmes spécifiques des malentendants !

Comment s’est déroulée votre scolarité ?

Bien, j’ai toujours été un bon élève. Et c’était un peu le problème. Parfois, les enseignants, même en sachant que j’étais malentendant, ne prenaient plus la peine de porter le micro, voyant mes bonnes notes. Il a fallu que je l’impose en leur disant « vous n’avez pas le choix ! ». Ce n’était pas toujours facile !

Et avec vos camarades ?

Plutôt bien, même si parfois certains étaient jaloux de l’attention que l’on me portait en raison de la malaudition. Mais les copains ont mûri et tout est rentré dans l’ordre !

Dites, vous avez l’air d’avoir un caractère bien trempé, avec une sacrée confiance en vous !

Je le dois à ma maman. Un jour elle m’a dit, et je ne l’oublierai jamais : « c’est toi qui t’adapte à la société, pas la société qui s’adapte à toi ! » Et puis, je n’ai pas le caractère d’un mouton, à me contenter d’attendre ou de suivre. Quand je veux quelque chose, je travaille pour l’avoir et je me fiche des ragots ! Ainsi, j’ai fait huit ans de piano en musique classique, alors qu’on se moquait de moi car c’était « ringard ».  En fait, je me suis assumé très tôt, ma maman travaillait et il fallait se prendre en charge, faire la lessive, le ménage, la cuisine !

Vous avez en outre une vraie passion pour la politique !

Oui, je suis au Parlement des Jeunes de Neuchâtel. C’est une expérience passionnante, par laquelle on essaie d’amener une note « jeune » à notre ville dont l’image est un peu vieillotte. Mais je n’appartiens à aucun parti, même si je me sens à droite, entre le PLR et l’UDC. De là à franchir le pas à l’échelon communal ou cantonal… Je ne sais pas, on verra dans 20 ans, je prends la vie comme elle vient !

Où en êtes-vous de votre scolarité aujourd’hui ?

Je fais un apprentissage d’employé de commerce en formation duale CFC/Maturité. Trois jours par semaine en entreprise et deux  jours de cours…

C’est très ambitieux !

Oui, je vise haut, j’aimerais bien devenir un jour journaliste de radio…

Incroyable, c’est un choix osé pour un malentendant !

Oui peut-être. A l’école j’avais passé des tests et deux professions sont apparues : « homme sage-femme » ou journaliste de radio. Sage-femme, ça m’aurait bien plu, mais je n’aime pas le milieu hospitalier. Alors journaliste, ça me va… Je vous l’ai dit, je ne m’interdis aucun rêve, et je suis prêt à beaucoup travailler pour les accomplir, même si ça doit me prendre 20 ans !

 

Propos recueillis par Charaf Abdessemed