Publié le: 14 septembre 2024

Pourquoi les malentendants et sourds n’ont pas participé aux Jeux paralympiques ?

Pourquoi les malentendants et sourds n’ont pas participé aux Jeux paralympiques ?

Les sourds et malentendants ont leurs propres Jeux olympiques appelés Deaflympics, accessibles à toute personne dont la perte auditive est supérieure à 55 décibels. Une spécificité qui remonte à 1924, liée pour l’essentiel à l’histoire du mouvement sourd.

Alors que les Jeux paralympiques de Paris se sont terminés ce dimanche, les plus observateurs auront sans doute remarqué l’absence de tout malentendant ou sourd dans les compétitions. S’agit-il d’un ostracisme ? Pas du tout ! L’explication réside ailleurs, plus exactement dans le fait que les sourds et malentendants ont… leurs propres jeux olympiques.

Pour comprendre cette spécificité, il faut remonter à 1924, soit 36 ans avant les tout premiers Jeux paralympiques qui ne datent eux que de 1960. C’est au début du 20e siècle en effet que furent fondés les premiers Deaflympics, à l’époque appelés « International Silent Games », destinés exclusivement aux sportifs sourds et malentendants. Leur fondateur est un certain Eugène Rubens-Alcais, un militant sourd français surnommé « Le Coubertin sourd » qui avait consacré une large part de sa vie à la défense de la langue des signes, alors largement ostracisée et marginalisée.

Prendre son destin en main

« Le point de départ de la création de ces jeux, c’était l’idée qu’il appartenait aux sourds et malentendants de prendre eux-mêmes leur destin en main, y compris dans le domaine sportif, explique un spécialiste du mouvement sourd. Cela s’inscrivait également dans la revendication du fait que la surdité n’était pas un handicap, encore moins en matière de pratique sportive, mais une culture linguistique minoritaire ».

Un point de vue largement confirmé par le Comité international des sports des sourds, -officiellement reconnu par le Comité international olympique et non le Comité paralympique international-, et dont la position est explicite : « Les sourds ne se considèrent pas comme des handicapés mais plutôt comme faisant partie d’une minorité culturelle et linguistique. (…) Au sein de la communauté des sourds, le soutien à des Jeux séparés est prépondérant ».

« De manière très pragmatique, l’autre raison de la séparation entre Deaflympics et Jeux paralympiques est financière, ajoute notre expert. Avec leurs propres Jeux, les athlètes des Deaflympics sont capables de communiquer entre eux, ce qui implique un bien moindre recours aux interprètes, très onéreux ».

Signaux lumineux

Seule condition pour participer aux Deaflympics : avoir un seuil d’audition inférieur à 55 décibels dans la meilleure des deux oreilles, et surtout ne pas porter d’appareillage auditif durant la compétition, au cours de laquelle s’appliquent d’ailleurs exactement les mêmes règles sportives que pour les Jeux olympiques ordinaires. Seule différence notable : l’usage de signaux lumineux stroboscopiques pour marquer le départ des différentes épreuves.

Une trentaine de disciplines dont l’athlétisme, la natation, le curling, le ski etc figurent au programme de ces Jeux qui se tiennent tous les deux ans, en alternance entre jeux d’été et jeux d’hiver. La principale difficulté réside aujourd’hui dans la faiblesse des recettes publicitaires, quasi-inexistantes, et qui ne suffisent pas à en assurer le financement.

Quant à la Suisse, elle a participé à l’aventure des Deaflympics quasiment depuis leurs débuts, dès 1928, avec des délégations allant d’une trentaine d’athlètes au début des années 2000, à 8 athlètes seulement, âgés de 18 à… 63 ans qui ont participé à la dernière édition en mars dernier, à Erzurum en Turquie.