Publié le: 21 mai 2023

Léa Rey: «Si on n'essaye pas, c'est qu'on a déjà échoué!»

Léa Rey: «Si on n'essaye pas, c'est qu'on a déjà échoué!»

Très active et sociable, Léa Rey est née il y a 27 ans à Billens, du côté de Romont (FR). Malgré un double handicap, auditif et visuel, elle mord la vie à pleines dents et fourmille de projets grâce à son inébranlable joie de vivre.

Depuis quand êtes-vous malentendante ?

Probablement depuis ma naissance même si cela n’a été découvert que vers l’âge de quatre ans et demi, quand parents se sont inquiétés parce que je ne parlais pas encore… Le plus drôle c’est que le premier ORL consulté a pensé que j’étais simplement une gamine qui crisait (rires). Heureusement, une logopédiste a très vite compris que j’avais une déficience auditive, vu que je ne répondais qu’une fois sur dix… 

Votre perte auditive est-elle importante ?

Oui, je suis malentendante et appareillée des deux côtés. Mais si à l’âge de cinq ans il me restait 60 % d’audition, aujourd’hui je n’en ai plus que 11 % avec une perte qui concerne surtout les aigus. Je n'entends pas les oiseaux ou le bip  quand on se canne un objet dans un magasin…

Connait-on la cause de cette perte ?

Aujourd’hui oui, parce que vers l’âge de 19 ans, à l'âge de 19 ans je me suis rendu compte que je voyais moins bien la nuit. Après des tests on a conclu que je suis atteinte du syndrome de Usher une maladie génétique qui se manifeste par une perte auditive suivie d’une perte de la vue. Ainsi, je vois correctement le jour, mais la nuit j'ai besoin d'une canne blanche car je ne vois plus les reliefs ni les distances… Apparemment, je suis le seul membre de ma famille à être atteinte de ce syndrome…

Cela a dû être un choc tout de même…

Ma première réaction a été de me dire que c’était une maladie que j’avais depuis ma naissance et que je ne le savais juste pas… Le mieux était donc d’apprendre à vivre avec et surtout de bien profiter de la vie pour mes parents ça a été beaucoup plus difficile.

Comment s’est déroulée votre scolarité ?

Après une première année à l'Institut Saint-Joseph pour sourds, j'ai fait toutes mes études à l'école publique sans jamais redoubler, ce dont je suis très fière. Les séances de logopédie 2 à 3 fois par semaine et un soutien spécialisé en classe pour les matières où j'avais le plus de peine m’ont beaucoup aidée. Si je parle aussi bien, c’est vraiment parce que j’ai une logopédiste en or ! (rires)

Et avec les camarades ?

La période la plus difficile pour moi a été le cycle d'orientation. C'est l'âge où les enfants deviennent méchants et il y a des discriminations et des moqueries. Toutes ces personnes qui m'ont fait du mal je les remercie elles m'ont l'a apporté la force que j'ai aujourd'hui (rires).

Que faites-vous à la fin de votre scolarité obligatoire en 2011 ?

Au départ je voulais devenir libraire.  J'ai donc fait une année à l'école de culture générale mais je me suis rendu compte que ce n’était vraiment pas pour moi.  Et puis alors que j’étais fille au pair à Neuchâtel, la maman qui faisait des décorations florales m'a proposé de faire un stage. C’est comme cela que je me suis lancée dans un apprentissage de fleuriste à l’école d’horticulture de Genève, entre 2013 et 2016.

Et cela s’est bien passé ?

Oui j’ai eu des professeurs compréhensifs et des patrons de stage qui ont été empathiques et ont joué le jeu. Si j'avais besoin d'aide, il suffisait de demander… La seule fois où cela a été compliqué c’était durant la dernière année avec un employeur pas très à l’écoute. Contre son avis, j’ai présenté l’examen du CFC et je l’ai réussi haut la main. Ma devise c’est : « si on n'essaye pas c'est qu'on a déjà échoué ! »

D’où vous vient cette belle assurance ?

De ma famille qui est très positive ! On se tire tous en avant, on est tous là pour nous encourager les autres les uns les autres et cela compte énormément.

Vous travaillez donc comme fleuriste…

Oui j'adore ce métier avec une partie créative et un partie relations avec les gens. Actuellement je travaille pour Feuriot qui a une très belle renommée  et j'en suis très contente !

Comment vous voyez-vous dans 10 ans ?

Beaucoup de magasins de fleuristes sont plutôt sombres avec des sols en bois, ce qui est vite handicapant pour moi… Du coup en parallèle de mon travail, je fais une formation continue en kinésiologie et dans 3 ans, j'espère pouvoir ouvrir mon propre cabinet tout en continuant à travailler à 20 ou 40% comme fleuriste.