Publié le: 15 mai 2015

Olivier Merz : « Ma surdité m’a fait mûrir ! »

Olivier Merz : « Ma surdité m’a fait mûrir ! »

Doté d’un caractère fort et déterminé, Olivier Merz devrait obtenir sa maturité en juin prochain. Âgé de 18 ans, ce jeune sourd vaudois, amateur d’alpinisme et d’escalade, s’apprête à passer huit mois à l’autre bout du monde.

Comment êtes-vous devenu sourd ?

Je devais avoir un an et demi quand mes parents ont remarqué que j’avais un problème d’ouïe, parce que j’avais mal compris ce que m’avait dit ma mère. On en ignore la cause exacte, mais des tests ont très vite confirmé une importante surdité bilatérale, qui s’est d’ailleurs aggravée vers l’âge de 7 ans. Heureusement, j’ai très vite été implanté ensuite.

En tout cas, vous parlez parfaitement et donnez le sentiment de très bien entendre !

C’est vrai, au point que certains de mes profs avaient tendance à oublier que j’avais des problèmes d’audition ! Beaucoup de gens ont d’ailleurs du mal à réaliser que je suis malentendant quand ils m’entendent parler plusieurs langues, me voient beaucoup voyager ou faire de l’escalade avec le club alpin suisse !

Comment s’est déroulée votre scolarité ?

Dès que ma surdité a été découverte, je suis allé à l'école cantonale pour enfants sourds de Lausanne pour y apprendre à parler avec une logopédiste, apprendre le français signé et le LPC. Mais dès 4 ans, j’ai intégré l’école communale de Nyon, puis celle de Le Vaud, où je vis encore aujourd’hui. C’est une école pour entendant, mais durant toute ma scolarité, j’ai été aidé par des codeuses LPC en classe et une maîtresse de soutien pédagogique, qui me suit d’ailleurs jusqu’à maintenant…

Et vos résultats scolaires ont été satisfaisants ?

Tout à fait ! J’ai eu de bonnes notes et n’ai rencontré aucun souci en raison de mes oreilles. En fait, je pense que comme j’ai rapidement accepté mon handicap, j’ai su m’adapter et utiliser toutes les aides possibles, LPC, logopédie, lecture labiale etc. Evidemment, il a fallu aussi beaucoup étudier et ce qui est sûr, c’est que j’ai dû deux fois plus travailler que mes camarades de classe (rires) ! La seule mauvaise période a été vers la 8ème 9ème année, l’âge de l’adolescence un peu bête en fait, où j’ai un peu été mis de côté. Mais ça n’a pas duré longtemps, d’autant que je savais que j’arrivais au bout de ma scolarité obligatoire !

Quel rôle a joué votre famille dans ce processus d’adaptation ?

Toute ma famille s’est toujours montrée très ouverte à mon handicap, au point qu’il nous arrive souvent d’en plaisanter ! Oncles, tantes, grands-parents, parents, tout le monde s’est intéressé, et ma maman s’est particulièrement impliquée. Chez moi, il n’y avait aucun tabou, et c’est une chance !

Qu’avez-vous fait, à l’issue de votre scolarité obligatoire ?

J’ai intégré le gymnase, à Nyon, dans le but de préparer une maturité fédérale que j’espère obtenir à l’issue des examens à venir, en juin prochain. En dehors de la maturité bilingue, c’est le meilleur diplôme pour intégrer l’université en Suisse !

Et quelle formation souhaiteriez-vous suivre à l’université ?

Je ne sais pas encore exactement. Je suis intéressé par la géopolitique, mais aussi par la sociologie ou la psychologie. En fait, j’aime bien comprendre comment les autres fonctionnent et comment on peut leur venir en aide ! Mais tout cela, c’est pour dans plus d’un an, car j’ai d’autres projets dans l’intervalle !

Alors que comptez-vous donc faire l’an prochain ?

Je vais passer 8 mois à l’étranger : je suis très intéressé par les modes de vie alternatifs, le respect de la nature, et pendant 10 ans j’ai participé à de fabuleuses colonies de vacances… Aussi, l’an prochain, je vais passer deux mois au Pérou pour travailler dans un hôtel dans une petite ville de montagne, trois mois en Californie pour travailler dans une ferme et enfin, deux mois au Canada pour y apprendre l’anglais et me former comme moniteur de ski.

Vous semblez très mûr et très affirmé pour votre âge…

Oui, c’est vrai, d’ailleurs mes parents pensent que c’est la surdité qui m’a fait mûrir plus vite que les autres. D’ailleurs, mes copains m’appellent parfois « le vieux » pour rigoler (rires) !

 

Propos recueillis par Charaf Abdessemed